Audrey et Grégory ont pris le temps de répondre à mes questions afin que je puisse partager avec vous un des principaux aspects qui caractérise mon entreprise: la qualité des fleurs que j'utilise. Elles sont exceptionnelles et vous comprendrez mieux pourquoi à travers ce reportage.
Je suis avec Audrey et Grégory. Ils ont créé une ferme florale à Asque dans les hautes Pyrénées. Un coin de paradis aux pieds des montagnes dans la magnifique vallée des Baronnies. Ils y produisent des fleurs, des plantes aromatiques et des plantes médicinales en agriculture biologique. Et ils font partie de mes partenaires de production pour Man-Fado.
Pouvez-vous nous raconter quelle a été l'impulsion pour créer Les Jardins d'Olha?
Il y a 5 ans encore, nous travaillions dans un tout autre domaine : le commerce pour Grégory et l’éducation spécialisée pour moi, Audrey. Mais nous sommes tous deux de grands amoureux de la nature et nous avions depuis longtemps l’envie de créer une activité professionnelle en lien avec la nature. J’ai grandi à la campagne, entourée de jardinières passionnées (et passionnantes) et sensibilisée dès mon plus jeune âge aux soins par les plantes. Je rêvais d’un lieu qui permettrait d’accueillir du public et de proposer des activités en lien avec la nature.
Celui qui nous a donné l’impulsion, c’est notre fils, Nélio. Le fait de devenir parents, a été le déclic pour mettre en cohérence notre vie familiale avec nos aspirations. Pour lui, pour tous les enfants d’aujourd’hui et de demain, nous décidons d’être acteurs du changement.
En 2018, après 2 années de formations et d’expériences agricoles, je commence la production de plantes aromatiques et médicinales. Un an plus tard, Grégory me rejoint. Très rapidement, l’envie d’élargir la gamme et un réel plaisir à travailler pour la matière végétale sèche nous donne l’envie de produire des fleurs séchées.
Et fidèles à nos premières aspirations, actuellement, nous mettons aussi tout en œuvre pour devenir une ferme pédagogique. L’aménagement des jardins, la création d’un lieu d’accueil, tout sera bientôt prêt pour que les jardins d’Olha deviennent une ferme florale pédagogique.
Quels ont été les plus grands défis à relever ?
Par chance, nous sommes d’une nature plutôt optimiste et confiante. Nous n’avons pas l’impression d’avoir rencontré beaucoup de difficultés. C’est clair qu’il faut avoir un mental assez fort pour faire face à la charge très importante de travail et aux faibles revenus les premières années.
Eventuellement, que cela soit pour nous ou pour tous les jeunes agriculteurs qui veulent se lancer, je dirais que le nerf de la guerre, c’est l’accès au foncier. C’est extrêmement difficile aujourd’hui de pouvoir acheter ou louer des terres agricoles. Les surfaces agricoles en France ne manquent pourtant pas, mais notamment à cause du système de la Politique Agricole Commune qui encourage les agriculteurs à garder toujours plus de terrains (plus tu as de surfaces, plus tu as de subvention de la P.A.C.), il ne reste quasiment rien pour les nouveaux installés.
A quoi ressemble une journée type ?
C’est justement ce qui nous plait dans ce métier, il n’y a jamais de routine ! Le fil conducteur, ce sont les jardins. Pas une journée ne se passe sans que nous soyons dehors. Ensuite, nous travaillons en suivant différents cycles en lien avec la production. Il y a la période des semis, la période durant laquelle on prépare les sols, la période des plantations, celle des récoltes et enfin un gros pic de commercialisation entre septembre et décembre. Et puis il y a la partie gestion administrative, moins drôle mais obligatoire et qui nous demande plusieurs heures par semaine. Avant d’être producteurs, nous sommes parents, donc toutes nos journées sont d’abord organisées par rapport aux besoins de notre fils. Par chance, il adore aussi être dehors donc on passe énormément de temps en famille dans les jardins !
Pouvez vous décrire vos valeurs, vos positionnements dans le métier ?
Quand nous avons choisi de devenir producteurs, c’était une évidence que nous voulions expérimenter un système agricole qui soit respectueux, résilient et productif.
Nous avons choisi de suivre les principes de l’agriculture bio intensive. C’est-à-dire que nous faisons le choix de cultiver sur petite surface (moins d’un hectare), d’utiliser très peu de machinerie et d’énergie fossile (essentiellement un motoculteur), de n’utiliser aucun intrant chimique, de travailler sur des planches de cultures permanentes et de favoriser un sol vivant. Nous sommes convaincus qu’un petit espace intelligemment cultivé peut produire autant, si ce n’est plus, que des hectares de mono culture.
De plus, nous constatons avec regrets que nous autres humains, nous avons perdu le lien avec la nature. Nous nous plaçons trop souvent comme supérieurs au reste du vivant et vivons pour la plupart d’entre nous, complètement coupés de la faune et de la flore. C’est ce lien que nous cherchons à rétablir à chaque étape de notre production.
Semis, plantation, récolte, séchage, effeuillage, empochage, toutes ces étapes sont faites manuellement. Un choix essentiel pour nous si nous souhaitons respecter la matière végétale.
La plupart des infusions que nous trouvons aujourd’hui (même en bio) sont conçues de façons complètement mécaniques et artificielles. Les végétaux sont récoltés à grand coup de moissonneuses batteuses, ils sont ensuite chauffés à très hautes températures avant d’être finalement broyées par des machines. Il ne reste rien de vivant dans ces infusions-là. Les fleurs que nous trouvons sur le marché, sont quant à elles, quasiment toutes produites à l’étranger souvent à grands coups de machineries et d’intrants chimiques.
Pour l’étape de la commercialisation, nous souhaitons aussi maintenir le lien avec le consommateur. Les tisanes sont vendues principalement en vente directe ou dans de petites épiceries avec qui nous partageons les mêmes valeurs de proximité et de qualité.
Nos fleurs séchées sont vendues à des professionnels comme toi, Man-Fado, et qui ont justement la volonté de travailler avec de la fleur française et de sensibiliser le consommateur sur une fleuristerie locale, durable et solidaire.
Modestement, à notre échelle, nous essayons de montrer qu’un autre modèle de production florale est non seulement souhaitable, mais aussi tout à fait possible.
Avez-vous innové ou au contraire récupéré des habitudes oubliées ?
Un peu les deux, puisque nous utilisons des techniques (celles du maraichage bio intensif) qui étaient largement utilisées par les maraichers parisiens du 19ème siècle et qui sont aujourd’hui remis aux goûts du jour, notamment grâce des personnes telles que Eliot Coleman et Jean-Martin Fortier.
A l’opposé de tous les immenses systèmes d’exploitation agricole que l’on peut voir aujourd’hui, le maraichage bio intensif a notamment pour finalité de produire beaucoup sur petite surface. Nous n’inventons donc rien, nous réactualisons un système qui a largement fait ses preuves par le passé. La nouveauté, c’est que nous appliquons les principes du maraichage bio intensif aux fleurs alors que jusqu’à présent, il était essentiellement utilisé pour la culture de légumes. Il existe de nombreuses références en ce qui concerne la plantation de légumes mais très peu en matière florale.
Nous prenons énormément de plaisir à tester certains éléments comme l’intensification du nombre de plants par m2, les apports de matières organiques, les paillages, les outils manuels…Eléments que nous enregistrons au fur et à mesure pour essayer de créer un référentiel en matière florale.
Avez-vous observé des petites victoires, des jolies surprises sur votre terrain depuis que vous l’avez travaillé?
Sur le plan de la biodiversité, nous avons choisi un terrain déjà extrêmement riche et nous habitons une vallée très préservée. La nature est reine ! Nous sommes chanceux.
Les satisfactions que nous observons rejoignent ce que j’expliquais précédemment. Nous cherchons à augmenter la production au m2 mais cela ne doit pas se faire au détriment du sol. Nous veillons donc à apporter d’importantes quantités de matière végétale (compost, fumier, paillage…) pour répondre aux besoins des végétaux sans carencer la vie biologique du sol. Les 1eres observations montrent que cela fonctionne : les sols sont vivants (micro-organismes, insectes, vers de terre en nombre) et les fleurs s’y développent très bien.
Quelles sont vos ambitions ou guides de vie pour les années à venir?
Nous rêvons d’un jardin luxuriant où se mélangent les arbres, les fleurs, les plantes aromatiques et où l’on puisse accueillir du public.
Dès que nous avons commencé à penser notre projet, c’était déjà une évidence que nous voulions créer un lieu de sensibilisation et de transmission. Nous adorons notre métier de producteurs, mais notre projet ne serait pas complet sans y ajouter la dimension pédagogique. L’aménagement des jardins a été pensé dès le début afin d’y accueillir des groupes. Aujourd’hui, nous sommes en train d’aménager une salle d’accueil pour pouvoir y proposer des activités pédagogiques : sensibilisation à l’environnement, découverte du cycle végétal, balades botaniques, créations végétales, découvertes des plantes comestibles et tinctoriales, création d’un jardin…
Et comme nous avons très régulièrement des demandes de formation de la part d’adultes qui souhaitent se former aux techniques florales, nous souhaitons aussi proposer des ateliers et des formations autour de cette thématique : création d’une ferme florale, montage de projet agricole, techniques de culture, découverte du modèle bio-intensif. Nous sommes persuadés que plus il y aura de personnes formées à ce type d’agriculture, plus les territoires verront apparaître des modèles d’entreprises agricoles vertueuses et respectueuses.
« Va prendre tes leçons dans la nature, c’est là qu’est notre futur. Léonard de Vinci
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Les jardins d'Olha et Man-Fado sont tous deux adhérents du Collectif de la Fleur Française, que je vous invite à découvrir ici.
Découvrez le bouquet "Elixir d'Amour", composé de fleurs issues de la production d'Audrey et Grégory et comportant une petite fiole de leur infusion bio "La Pétillante".
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